Projet Timeline
Recherche sur l’habitat et l’objet habitable.
Etude 2015.

La question de l’organisation du temps est aujourd’hui centrale, et avec elle, la question de vivre le temps lui-même. L’idée de porter attention au temps découle du fait que désormais celui-ci, plus que l’espace, conditionne notre vie.
Le projet Timeline s’attachera à programmer les temps fonctionnels de l’habitat, et non plus les espaces. En prenant comme référent un cadre spatial donné, (50 m2 habitable), le projet s’affranchit des questions de compacité dimensionnelle pour laisser place à une qualification de l’habitat par les scénarios temporels quotidiens.
Pour l’habitant, le montage de son environnement fonctionnel en séquence habitables sur une timeline, lui permet de densifier ou étirer certaines fonctions ou moments de la journée.
Ainsi, l’ergonomie prend une tout autre dimension et motivation. Elle devient temporelle.
Les dimensions physiques du corps ne sont plus prioritaires. Ce sont les dimensions physiologiques et psychologiques du temps qui définissent les espaces ergonomiques utilisables. Par exemple, l’espace de repos prend une place importante dans l’habitat parce qu’on y passe beaucoup de temps, ainsi le volume d’air est plus approprié à l’apport physiologique dont à besoin le corps durant une nuit.

Si l’urbanisation croissante du territoire, fait de l’urbain, un modèle étendu au-delà des villes, la densification urbaine peut s’entendre comme la multiplication de temps fonctionnels, synchronisés ou juxtaposés.
Il en va de même dans l’habitat. Deux individus partagent une même densité de temps lorsque leurs instants de vie sont synchrones. Au contraire, les densités sont différentes, lorsque ces deux individus ont des activités parallèles dans un même habitat.
La densité de temps dans un même espace augmente avec le nombre de personnes. Si la quantité d’actions augmentent au sein même de l’habitat, et sans compter les possibles communications et connexions avec l’extérieur, le temps devient beaucoup plus dense pour ses habitants. Les usages simultanés provoquent une intensification et une accélération des
échanges entre les personnes. Le temps vécu est plus intense.
Plus loin, sur un plan émotionnel, la densité temporelle, et son contraire, la dilatation temporelle, peuvent être vécu dans un même temps chronométrique selon que l’action ou pensée générée soit plus ou moins intense ou intéressante. Le temps devient émotionnel, à cet instant, le temps n’est plus programmé, il est vécu.

Si le média «Timeline» est une figure moderne, linéaire et fuyante, propice à l’accélération et à la vitesse, et par là-même, à l’incident, il est rassurant d’entrevoir de nouvelles possibilités pour cette Timeline, moins définitives et plus interactives, permettant d’envisager une reconfiguration ou modulation du système.
L’explosion de la pratique vidéo et son importance dans le temps quotidien de chacun permet de supposer que les structures même de ce médium peuvent être un filtre de requalification de la vie elle-même, comme si le stream vidéo devenait le principe même de l’économie (organisation) de notre vie. Jouer, arrêter, revenir, accélérer, et plus encore, avoir accès à un fragment de temps hors dispositif spatial définit.
Faut-il rappeler que nous sommes le curseur de notre habitat, mais aussi le réalisateur, voir le producteur.

Le projet se nourrit d’une récolte de données pour programmer les formes et les séquences de l’objet habitable : la Timeline. Un vocabulaire proche du temps et de la timeline est employé pour qualifier ce nouvel habitat : Timeline (habitat) / Rythmes usagers / Interpolation des usages et des ergonomies / Montage et séquences habitables / Synchronisation des usages / Compositing matières / Cadence énergétique (production et consommation).

Etape 1 : Data.

Data / Rythmes usagers.
La recherche de données sur les usages et l’habitat, leur exploitation et leur organisation sous forme de data-visualisations, permet de mettre en place un nouveau modèle d’interprétation des pratiques quotidiennes, basé sur la notion de densité temporelle.

Data / Cadence énergétique.
Les données concernent à la fois la consommation et la production d’énergie. Elles représentent la capacité pour l’habitant de produire sa propre énergie et de la partager sur un réseau distribué. L’objectif étant d’équilibrer sa cadence énergétique.

Etape 2 : Programme

Programme / Modules extensibles / Temps interpolé.
Les modules-meubles sont les unités élémentaires de vie pour une habitation. Ils peuvent s’étirer ou se dupliquer en fonction des temps d’usages. Ils se combinent ensuite entre eux, interpolant ainsi les moments de vie les uns avec les autres.

Programme / Montage et séquences habitables / Temps composé.
Le montage de séquences habitables se réalisent en fonction du scénario de vie, du ou des usagers, de leurs rythmes quotidiens, de leurs affinités, de leurs activités prioritaires, de leurs activités extérieures,…

Programme / Montage et séquences habitables / Typologies temporelles.
Les typologies de temps, (linéaire, cyclique, fragmenté, …) , déterminent des organisations diverses de l’habitat ; les typologies temporelles devenant des options quasi-philosophiques de la manière de vivre et d’habiter.

Programme / Voisinage / Temps synchronisé.
Les relations entre plusieurs habitats peuvent être pensées et organisées en fonction de temps synchronisés : mettre en relation les moments de vie des habitants en interfaçant leurs rythmes fonctionnels, physiologiques, leurs habitudes de vie, jusqu’à proposer des organisations collaboratives ou mutualisées de leur temps, (pour le travail par exemple).

Programme / Réseaux distribués / Temps énergétique.
Les «énergies distribuées» permettent aux habitations de produire leur énergie grâce au soleil, au vent, à la pluie, et de distribuer leur excédent sur le réseau, ou, de s’y connecter pour parer à un déficit énergétique local.

Programme / Intimité / Temps masqué.
L’habitat doit pouvoir répondre, soit à son ouverture, soit à sa fermeture, sur l’environnement extérieur. Des rideaux souples et coulissants, sur chaque module, permettent d’obturer certains moments ou certaines fonctions de l’habitat.

Programme / Enveloppe / Temps climatique.
Les modules de vie peuvent être complétés d’une structure enveloppante filtrant le climat extérieur et isolant au besoin le climat intérieur. Des parois techniques remplissent la structure en fonction des besoins et selon l’implantation spatiale et géographique des modules ; (ancrage à l’intérieur d’une architecture existante qui les protégera en partie, ou en plein paysage urbain ou naturel).

Programme / Textures / Temps manipulable.
Les modules composites sont constitués de plusieurs types de matériaux, fixes ou mobiles, offrant différentes textures au corps. Ils sont conçus à partir de matériaux plus ou moins denses. Les matières structurelles ont une densité élevée, alors que les matières proches du corps sont plus molles, souples, perméables et légères. Les éléments dynamiques et manipulables sont colorés. Les réseaux sont conduits dans les structures et les éléments fixes. Des capteurs sont intégrés aux éléments dynamiques et tactiles. Les modules ont chacun la possibilité de fonctionner en autonomie ou d’être raccordés entre eux, faisant d’un module ou de l’habitat entier, un objet connecté en réseau.

Etape 3 : Fabrication

Fabrication / Économie adaptée.
Le projet est conçu pour s’adapter à différents process de fabrication, matériaux et budgets. Les modules à géométries simples, du programme d’habitat TIMELINE, permettent à un producteur ou un fabricant, de s’approprier simplement les plans, et, d’interpréter et suggérer une stratégie de production ; d’un agencement de composants industriels semi-finis, à une ébénisterie sur mesure sélectionnant des matériaux nobles ou très techniques. Une piste technologique intéressante est l’impression 3D par dépôt de fils pour des pièces importantes comme les meubles. La matière utilisée et injectée sous forme de granulat fondu provient de matériaux recyclés comme les déchets de bois et les bouteilles plastiques. Le dépôt de fils par gravité, permettrait de réaliser, par empilement successifs, les principaux volumes. Le dépôt répété du fils s’arrêtant lorsque l’extension de la fonction atteint sa dimension via un temps machine calculé.